Rarement la réalité aura été aussi déformée. A voir les télévisions, à lire les manchettes de trop de journaux aussi, on pouvait croire qu’une vague d’antiaméricanisme avait submergé le monde musulman et que les partisans de la guerre sainte contre l’Occident, les jihadistes, y avaient pris les commandes. Eh bien, non ! Ni de près ni de loin ce n’est l’enseignement à tirer des manifestations provoquées par la diffusion de cette vidéo sur Mahomet car, enfin, où étaient ces masses fanatisées, ces foules sanguinaires dont on croyait comprendre qu’elles avaient envahi la rue arabe ? Où y eut-il même des rassemblements assez significatifs pour laisser penser que le jihadisme, même minoritaire, avait repris du poil de la bête et que le monde était plus que jamais menacé d’un «choc des civilisations» ?
A deux exceptions près, la réponse est simple : nulle part. Au Liban, plusieurs dizaines de milliers de chiites du Hezbollah se sont mobilisés, bien loin de l’ambassade américaine et, avant tout, pour marquer un rapport de force avec les sunnites qui, contrairement à eux, sont favorables à l’insurrection syrienne. A Khartoum, dix mille personnes ont manifesté mais c’était somme toute bien peu dans un pays, le Soudan, dont les dirigeants cultivent l’identité arabo-musulmane pour éviter sa complète dislocation. Et ailleurs ?
Ailleurs, quelle qu'ait été leur violence ,les manifestations ou assauts contre les ambassades n'ont réuni que quelques centaines de personnes, deux