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Libération
TRIBUNE

Sans révolution culturelle, les printemps arabes sont inachevés

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Le monde arabe en ébullitiondossier
publié le 19 septembre 2012 à 19h12

L’onde de choc provoquée dans le monde musulman par la diffusion vidéo d’une petite fiction mettant en scène le Prophète est aussi le résultat d’un «printemps arabe» inachevé. Le versant culturel d’une telle révolution n’a pas été accompli. Pourtant, de la Tunisie au Yémen, c’est une jeunesse avide d’expressions culturelles qui a «dégagé» les dictateurs hors des palais. Après, il y a eu un grand vide, rapidement occupé par l’activisme religieux. La France qui a participé à ces changements majeurs au sud de la Méditerranée, n’a plus une politique culturelle arabe digne de ce nom pour accompagner ces mouvements.

Le Damascain Muhammad Kurd Ali (1876-1952), journaliste, homme de lettres, un des pères de la renaissance arabe (Nahda) et ministre de l'Instruction publique dans la Syrie du début du siècle dernier, écrivait : «Ainsi se trouve démentie la règle qu'avaient posée quelques esprits de peu d'envergure, qui n'accordent aucune estime à la science grammaticale [en arabe] des chrétiens, et, aux juifs, aucune aptitude au chant. Grâce à l'instruction, il y a, maintenant, des grammairiens arabisants sûrs parmi les chrétiens, et des chanteurs et des chanteuses parmi les juifs…» Venant d'un des plus francophiles des Syriens, qu'on surnommait le «Père des Académies arabes», une telle sagesse confirme l'esprit de cosmopolitisme culturel dans lequel, durant la seconde moitié du XIXe siècle, le Proche-Orient a vécu sa renaissance arabe. Muhammad Ku