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Libération
Reportage

A Richmond, le blues de la communauté noire

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Dans cette ville de Virginie au lourd passé esclavagiste, les Afro-Américains ont vécu l’élection d’Obama avec une intense fierté. Et s’ils voteront quasiment tous pour lui, les Noirs estiment que leur situation ne s’est guère améliorée.
Un petit commerçant dans le Southside, quartier noir et déglingué. (Photo Allison Shelley. )
publié le 28 octobre 2012 à 20h26
(mis à jour le 5 novembre 2012 à 23h28)

Là où les esclaves étaient jadis débarqués, elle est ce matin en train de pêcher.

«J’attrape des poissons-chats, des perches, des bars rayés aussi parfois,

explique Donna James, sans quitter ses lignes des yeux.

Quand j’ai une bonne prise, ça me fait au moins un repas, ou un peu d’argent.»

En plein centre de Richmond, en Virginie, derrière l’usine de retraitement des eaux, cette rive du fleuve James est aujourd’hui abandonnée aux herbes folles : des docks où arrivaient les esclaves, entravés les uns aux autres, on ne voit plus que des panneaux indicatifs, installés tout récemment pour entamer un travail de mémoire.

«De 1830 à 1860, Richmond fut l’un des principaux points d’entrée des esclaves noirs de la côte Est de l’Afrique»,

signale l’un de ces panneaux, juste derrière Donna.

«C’est bien qu’on commence enfin à s’intéresser un peu à cette histoire, approuve la pêcheuse. Moi, je ne sais même pas d’où venaient mes ancêtres avant qu’ils n’arrivent ici.»

Employée de nuit dans une usine de cigarettes, pour 8,50 dollars de l’heure (6,50 euros), Donna avoue aussi ne pas avoir tellement le cœur à ces questions :

«J’ai plutôt du mal à joindre les deux bouts. L’année dernière j’ai perdu mon emploi, où j’étais payée 10,35 dollars de l’heure. Mais je n’en veux certainement pas à Obama,

précise-t-elle.

Je vais à nouveau voter pour lui, bien sûr. Il ne pouvait pas régler tous les problèmes en quatre ans, il lui faut plus de temps.»

«Il y a eu un retour de bâton»

Quatre ans