Le 17 novembre 1982, en pleine guerre civile libanaise, Wadad Halwani, une institutrice dont le mari a été enlevé, appelle sur une radio locale toutes les familles de disparus à se rassembler. Mais, trente ans plus tard, la grande majorité d'entre elles ignore toujours le sort de leurs proches. «Mon fils a été enlevé en juillet 1981 à l'âge de 16 ans. S'il est mort, je veux le savoir pour faire mon deuil. Il a le droit d'avoir une sépulture, et nous avons besoin d'un lieu où nous recueillir en sa mémoire», raconte Hafaf Kamourié, mère d'un disparu.
Selon un rapport de police publié en 1991, 17 415 disparitions ont été répertoriées entre 1975 et 1990, même si les ONG estiment que ce nombre est sans doute surévalué. La plupart de ces personnes sont probablement mortes aujourd’hui, mais la société civile réclame le «droit de savoir», encouragée depuis 2005 par le retrait syrien du Liban et la création du tribunal international pour juger les assassins de Rafic Hariri.
«Les politiciens brandissent la menace du chaos si l'on rouvre les plaies de la guerre, mais c'est au contraire la seule solution pour éviter les violences. Le retour des enlèvements au Liban cet été est le résultat de vingt ans de politique de l'oubli», explique Wadad Halwani, présidente du comité des familles de disparus. La classe politique a toujours pris soin d'empêcher la recherche de la vérité, et pour cause : les chefs de milices de la guerre civile occupent toujours les plus hauts postes p