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Brésil Le torchon brûle chez les bonnes

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Depuis l’arrivée de la gauche au pouvoir en 2003, les domestiques, traditionnellement indispensables à la bourgeoisie, chamboulent un métier qui était encore marqué par le souvenir de l’esclavage.
par Chantal Rayes, Correspondante à São Paulo
publié le 10 décembre 2012 à 19h06

Les journées de travail interminables et les humeurs de la patronne… Des années durant, Ana Estela, 30 ans, les a laissées glisser sur elle sans broncher. «Le sort d'une domestique, c'est d'être exploitée et humiliée», dit-elle.

Epoque révolue. Voilà un peu plus d'un an que la jeune femme, ex-nounou et bonne à tout faire, a rendu son tablier. Brushing impeccable et yeux fardés, elle travaille désormais comme aide coiffeuse dans un salon chic de São Paulo. C'est son ex-patronne qui, résignée à son départ, l'a introduite ici. Le rêve d'Ana Estela : gravir les échelons du métier, voire monter un jour sa propre affaire. «Aujourd'hui, il est plus facile de quitter un travail de domestique, dit-elle. On peut suivre une formation professionnelle ou même entrer à l'université.»

Dans le même salon, Linda, 49 ans, chargée de l'entretien, est elle aussi une ancienne doméstica. Depuis ses 18 ans, elle n'a rien fait d'autre. Sa dernière expérience, chez un procureur arrogant et qui refusait de surcroît de la déclarer, l'a décidée à sauter le pas. Linda s'enflamme : «J'ai préféré rester plusieurs années au chômage plutôt que d'être à nouveau domestique. Les patronnes n'ont qu'à faire leur ménage elles-mêmes ! Fini le temps où il fallait les supporter.»

Au Brésil, les bonnes commencent à relever la tête. Comme à la télé. A moins que ce ne soit le contraire, que la télé se soit emparée de l'air du temps : cette année, des employées de maison étaien