C’est un regard qui arrête net et dont la violence ne se dissipe pas, longtemps après la lecture de l’article. La photo a été prise le 28 novembre par Jérôme Delay de l’AP, pendant une manifestation d’enfants des rues de Goma, à l’extrême est de la république démocratique du Congo. C’était quelques semaines après que les rebelles du M23 s’étaient rendus maîtres de la ville pendant une dizaine de jours, jusqu’à ce que l’armée régulière ne reprenne la direction des opérations.
Le reportage de Maria Malagardis décrivait l’atmosphère de peur qui imprègne chaque parcelle de la ville, des rumeurs d’une nouvelle attaque des rebelles, des histoires que l’on raconte sur les exactions commises au cours de ces dix jours, sur les voleurs lynchés, la nuit, dans les faubourgs de Goma. De leurs cadavres brûlés dans la rue et d’actes de cannibalisme… La colère qui déforme les traits du jeune homme, au point de masquer son âge (a-t-il 13, 15 ans, davantage ?), est sidérante à plus d’un titre.
En premier lieu, c’est la solitude de cet enfant sur le cliché qui frappe. Il est au milieu d’une foule et pourtant, il est seul, comme si cette rage n’acceptait aucune communion, aucun partage, mais l’unique et impérieux besoin de s’exprimer envers quiconque croisera son regard.
Pourtant, il y a du monde autour de lui. Mais les militaires encadrant la manifestation ne sont que des silhouettes floues, à l’image de la nature même de leur incompréhensible mission. Et il y a aussi l’autre jeune homme, vêtu d’