Sur l'une des avenues du centre de Gao, un pick-up blanc muni d'un grand drapeau malien démarre en trombe dans un nuage de poussière. Une demi-douzaine de jeunes a grimpé prestement à l'arrière du véhicule. Ces autoproclamés «patrouilleurs» semblent bien décidés à nettoyer la ville des présumés complices des islamistes qui ont fait régner la terreur à Gao, durant neuf mois, avant d'en être délogés par les forces françaises ce week-end. L'heure de solder les comptes a sonné dans cette cité des bords du fleuve Niger. Quelques minutes plus tard, un camion de militaires maliens, suivi à distance par une jeep de l'armée française, prend la même direction que les patrouilleurs. Les soldats arriveront juste à temps pour les empêcher de lyncher quatre hommes soupçonnés d'être des collaborateurs du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao). Ceux-ci seront emmenés en urgence dans un camp militaire près de l'aéroport.
«Nous savons très bien qui a cassé, violé et pillé dans notre ville durant des mois, affirme le coordinateur du mouvement, Moussa Yoro. Il faut que justice soit faite, que l'Etat punisse tous ceux qui ont commis des crimes.» Sinon, les patrouilleurs pourraient bien s'en occuper eux-mêmes. Leurs cibles : les Touaregs et les Arabes - ceux qu'on appelle ici les «peaux blanches» -, majoritaires au sein des groupes islamistes. Quelques jours après l'explosion de joie qui a salué l'entrée dans Gao des troupes française