Professeure d’histoire contemporaine à l’université La Sapienza de Rome et vaticaniste, Emma Fattorini décrypte la démission surprise de Benoît XVI et les répercussions pour l’Eglise catholique.
Benoît XVI avait indiqué qu’il démissionnerait en cas d’épuisement. Son état de santé est-il vraiment la raison de cette annonce ?
Pas seulement. Cette démission est aussi le résultat d'un choix très courageux. Benoît XVI est très affaibli, mais il ne démissionne pas parce qu'il est épuisé. Il n'agit pas dans un esprit de renoncement. Ce n'est pas comme le pape Célestin V [qui démissionna en décembre 1294 à l'âge de 80 ans, après seulement cinq mois de pontificat, ndlr]. Ce n'est pas un abandon physique et moral. Certes ce geste intervient alors qu'il est très fatigué physiquement, mais aussi à un moment où l'Eglise est en grande difficulté. Confronté à Vatileaks, à la trahison de son majordome, aux scandales autour de l'IOR [l'Institut pour les œuvres de la religion, la banque vaticane], ou encore ceux autour de la pédophile, il décide de faire un geste d'une grande énergie vitale, qui peut ouvrir un parcours constructif. En résumé, il démissionne car il reconnaît qu'il n'a plus la force pour gouverner le navire, mais il le fait en donnant à l'Eglise un incroyable signe d'innovation et de modernité. C'est un moyen de continuer