La brume qui flotte sur la plaine de la Bekaa permet à peine de distinguer les sommets de l’Anti-Liban qui marquent la frontière naturelle avec la Syrie. Au bout d’un chemin de terre, une carcasse de béton hérissée de barres d’acier et entourée de champs de neige semble plantée au milieu de nulle part. Des vêtements suspendus à un fil indiquent que l’immeuble inachevé est habité. Au premier étage, une porte bricolée avec une planche donne sur le «salon», comme l’appelle Zahra. Une pièce de 20 m² dans laquelle cette mère de famille originaire de Homs dort avec son mari, ses quatre enfants, et la famille de sa sœur.
Les onze personnes se sont installées ici depuis une semaine, à Majdal Anjar, une localité située à moins d'un kilomètre de la frontière. «Nous louions depuis plusieurs semaines un entrepôt, mais, un soir, les enfants se sont battus avec ceux du propriétaire, il nous a chassés brutalement. Nous n'avons trouvé que cet endroit pour nous loger», raconte Zahra. De la buée s'échappe de ses lèvres, tellement la température est glaciale. Dans la pièce, l'isolation est quasi inexistante : des films plastiques et des cartons d'emballage de jus de fruits font office de fenêtres. Les enfants gambadent pieds nus, et ne restent jamais bien loin du poêle, le sobia, «offert par d'autres réfugiés syriens». Les «toilettes», dans une pièce voisine, consistent en un vulgaire trou creusé dans le béton.
«Quand nous avons fui la Syrie, cet été, nous