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Libération
TRIBUNE

L’heure de vérité tunisienne

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par Béligh Nabli et William Leday, Responsable du pôle international de Terra Nova
publié le 19 février 2013 à 19h06

Plus de deux ans après l’immolation par le feu de Mohamed Bouazizi, un autre événement a provoqué en Tunisie une nouvelle onde de choc. Malgré des circonstances différentes, ces deux morts se font écho. L’assassinat de Chokri Belaïd revêt en effet une signification sacrificielle : le défunt se savait en danger pour ses idées et n’a pas voulu céder à la peur. Tel est le premier acquis du réveil arabe : par une souveraineté recouvrée, le peuple a vaincu sa peur de l’appareil (répressif) étatique.

Cet assassinat n’est pas le premier du genre, puisque le 18 octobre 2012, Lotfi Nagdh, coordinateur régional de Nidha Tounes (parti politique d’opposition de centre droit), fut aussi assassiné à Tataouine (sud du pays), dans des circonstances toujours non élucidées. Certes, on ne saurait ignorer les liens étroits qu’entretiennent violence et politique, violence et démocratie : l’histoire des démocraties américaines et européennes rappelle combien cette forme de gouvernement n’est pas l’espace sociopolitique pacifié tant idéalisé. Il n’empêche, le passage à l’acte marque un tournant dans la «Tunisie post-Ben Ali». L’assassinat politique de Chokri Belaïd est un acte de rupture matérialisant une césure nationale qui va au-delà de la dichotomie commode mais superficielle entre «islamistes» et «laïques». Cet événement tragique démontre aussi l’incapacité de la coalition au pouvoir à stabiliser un pays aux prises avec une insécurité croissante et une crise économique et sociale aiguë. Une in