Etudiant à Paris dans les années 50, il avait fait la leçon à l'un de ses camarades : «Tu es trop sensible. Pour faire de la politique, il faut être dur.» Nul doute que Ieng Sary, décédé hier à Phnom Penh à l'âge de 87 ans, fut dur. C'était l'un des plus puissants dirigeants Khmers rouges et l'un des plus retors. Dans la galaxie sanguinaire du régime qui a dirigé le Cambodge entre avril 1975 et janvier 1979, Ieng Sary occupait le poste de vice-premier ministre des Affaires étrangères. Tour à tour frère numéro 2 ou 3, il était le l'homme le plus visible de la secrète «Angkar», l'organisation qui a fait régner la terreur en exécutant au moins 1,7 million de personnes en moins de quatre ans. Aux côtés de Pol Pot, l'obscur frère numéro un, de son adjoint Nuon Chea, l'idéologue exterminateur, de Ta Mok, le «boucher» de l'ouest cambodgien, ou de Son Sen, le patron de la police secrète, Ieng Sary affichait le visage en apparence lisse de la diplomatie khmère rouge.
Cet homme grand et replet – même aux pires moments des privations imposées par l'utopie polpotiste – jouissait d'un pouvoir considérable dans le Kampuchéa démocratique des Khmers rouges. Ieng Sary s'en est toujours défendu, comme il a toujours nié toute part dans les atrocités commises par le régime marxiste totalitaire. Il disparaît sans avoir livré la moindre explication sur son rôle et sa fonction passés devant les Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens qui le jugeaient avec Nuon Chea et Kh