On l'appelle la «Cracolândia» ou «terre du crack», ce dérivé bon marché de la cocaïne dont le Brésil serait devenu le premier consommateur. Là, en plein cœur de São Paulo, la plus grande ville du pays, errent les frêles silhouettes des nóias, les fumeurs de crack, en général des SDF. Face à ce fléau, le gouverneur de l'Etat de São Paulo, Geraldo Alckmin (centre droit), a sorti sa baguette magique : les nóias sont hospitalisés contre leur gré pour se faire traiter. L'hospitalisation sans consentement peut être sollicitée par la famille ou prononcée par un juge. Un avis médical est toutefois nécessaire. Les récalcitrants sont emmenés de force par le Samu local, le recours à la police n'étant pas exclu.
En vigueur depuis le 21 janvier, cette mesure extrême fait polémique. Pour ses partisans, dont le gouvernement de Dilma Rousseff (centre gauche) - qui a lancé fin 2011 un programme de lutte contre l'«épidémie» de crack -, elle peut sauver des vies. Ses détracteurs, eux, dénoncent une politique autoritaire vouée à l'échec. «Plus de 90% des usagers de drogues hospitalisés contre leur gré finissent par rechuter», pointe le psychiatre Dartiu Xavier, qui parle d'un «retour à la logique de l'asile», dans le but de «nettoyer» la Cracolândia. L'an dernier, São Paulo avait envoyé la police sur place pour disperser les nóias, mais des centaines d'entre eux sont toujours là. «Ces gens dérangent, car ils mettent à nu les manquements d