Ricardo Calderón avait profité du 1er Mai pour aller interviewer des contacts hors de Bogotá, pour les besoins de son enquête sur un scandale dans l'armée colombienne. C'est à un péage, au retour, que le journaliste de l'hebdomadaire Semana a vu deux hommes «descendre d'un véhicule gris» et l'appeler par son prénom. Il a tout juste eu le temps de sauter pour échapper aux tirs qui ont troué sa voiture de cinq balles. «Il est évident qu'il était suivi, a réagi la direction du magazine. Il ne s'agit pas de deux tueurs isolés, mais de quelque chose de beaucoup plus délicat.»
Le journaliste enquêtait sur le traitement de faveur accordé à des soldats et officiers condamnés pour des tueries de civils dans la prison militaire de Tolemaida. Les bungalows climatisés, les commerces et les sorties à la piscine tolérés par l'établissement avaient été dénoncés une première fois par Semana il y a deux ans, entraînant des promesses de grand nettoyage de la part du pouvoir.
Mais, d'après les dernières révélations de l'hebdo, les bourreaux ont maintenu leur train de vie : beaucoup touchent leur solde et tiennent des commerces, certains partent faire leurs emplettes à Bogotá dans les véhicules de l'armée, et quelques-uns ont fêté le dernier réveillon au bordel. Pourquoi tant de complaisance ? «Si nous nous mettions tous à raconter la véritable histoire de la guerre, avance un des détenus dans l'article, il y aurait beaucoup de