Traducteur en France de Neige et d'Istanbul d'Orhan Pamuk, Jean-François Pérouse est aussi géographe. Il n'est jamais revenu d'un séjour d'études à Istanbul fin 1999 qui devait durer six mois, et dirige aujourd'hui l'Institut français d'études anatoliennes (Ifea), dont l'Observatoire urbain d'Istanbul (Oui) permet d'étudier et de mettre en perspective les récents événements dans la capitale économique et culturelle turque. Le géographe s'attache à déjouer les nombreux clichés sur cette mégapole. Ce n'est pas New York, c'est davantage une ville multiculturelle que cosmopolite. Une mégapole à la fois turque et mondialisée.
Les derniers projets d’aménagement ont déclenché une véritable insurrection pacifique. Pourtant, la plus grande ville européenne de Méditerranée ne doit pas en être à son premier plan d’aménagement urbain…
Entre 1950 et 2000, la population d’Istanbul a été multipliée par neuf. Le développement de la ville s’est accéléré surtout à partir des années 50 ; entre 1970 et 2010, la population stambouliote passe de 3 à 12 millions. Jusque dans les années 80, c’est surtout l’exode rural qui nourrit cette croissance urbaine. Puis elle devient exponentielle. La ville n’a pas attendu les planificateurs. C’est le règne quasi exclusif du secteur spéculatif privé. L’expansion spatiale se fait en «tâche d’huile», en suivant les grands axes de communication. Des quartiers autoconstruits, qui finissent par être légalisés, aux no man’s lands traversés par certains axes routiers qui mènent aux périphéries, on peut parler d’une anarchie urbaine et d’une énergie certaine.
Comment la carte électorale peut-elle se lire socialement ?
La carte des ré