Dans une petite maison qui sert d’hôpital de campagne, à l’intérieur d’une chambre froide pas froide du tout, ils sont là, posés à même le sol, recouverts par des draps blancs maculés de sang. 37 cadavres, 37 sympathisants de Mohammed Morsi, tués cette nuit lors d’affrontements avec la police, à quelque 500 mètres du campement de Rabaa, principal lieu de rassemblement islamiste depuis un mois. Une foule hétéroclite de photographes, de médecins ou de proches des victimes est massée dans l’entrée de la maison, en attendant l’évacuation des corps. Les bénévoles, gilets orange sur le dos, ont bien du mal à contenir la foule qui crie ou pousse de tous les côtés.
Champ de ruines et barricades
Après avoir tenu cinq bonnes minutes, ils finissent par céder face à un homme qui, à coups d’épaule, a réussi à enfoncer la porte d’entrée de l’hôpital. Celui-ci a une carrure imposante, il porte une longue barbe brune, il est très agité, il hurle, il veut voir un médecin, savoir si son frère fait partie des victimes. Le docteur Yehia Makeya a besoin d’un haut-parleur pour pouvoir être entendu et remettre un peu d’ordre. Ce généraliste est présent depuis ce matin. Sans laisser transparaître d’émotions, il détaille le bilan de la sinistre nuit : 75 morts dont 37 ont été transférés dans cet hôpital, 4500 blessés dont la plupart du fait des gaz lacrymogènes, environ 300 blessés par des tirs de grenaille dont 5 qui ont perdu un œil, 200 autres par des coups de bâtons ou de couteaux. La plupart des personnes décédées ont été t