Pour la pègre aussi, les temps sont durs. Même pour les parrains japonais à la tête de puissants clans. Kenichi Shinoda vient d'en faire l'amère expérience, le 16 juillet. Ce kumicho (boss) du Yamaguchi-gumi, la plus grande famille de yakuzas de l'archipel, se retrouve malgré lui au cœur d'une affaire sans précédent.
Brisant une omerta tenace, une femme, manageuse d’un restaurant dans le centre-ville de Nagoya (sud-ouest de Tokyo), a porté plainte pour racket contre le plus important chef mafieux du Japon. Elle lui réclame 17,35 millions de yens (environ 133 000 euros) pour l’argent qu’elle a versé entre 1998 et 2010 en échange de la protection de son commerce. Chaque mois, elle devait payer entre 30 000 et 100 000 yens (230 et 770 euros) à un membre de Inabaji-ikka, une bande locale affiliée au Yamaguchi. En 2008, la restauratrice a voulu mettre fin à l’extorsion de fonds, avant de vite se raviser : les yakuzas menaçaient de brûler son établissement. Mais au lieu de se retourner contre eux, la plaignante, dont le nom n’a pas été rendu public, a choisi de frapper fort, directement à la tête du clan Yamaguchi.
C'est là que le banal fait divers prend une tout autre dimension. En vertu de la loi contre le crime organisé, la manageuse a fait valoir que c'est le kumicho Kenichi Shinoda lui-même qui porte «la responsabilité en tant qu'employeur». Le texte antigang a été renforcé en 2008 afin que les citoyens puissent poursuivre les yakuzas, et surtout pour