«Il faut que tout change pour que rien ne change.» En Egypte, deux ans et demi après la révolution, la célèbre phrase extraite du Guépard, de Giuseppe Tomasi di Lampedusa, est d'une actualité brûlante. Le renversement du président Morsi, le 3 juillet, n'a pas seulement conduit à la mise au ban des islamistes, il a aussi remis en selle des acteurs de l'ancien régime, les fouloul (les «restes»). Discrets pendant deux ans, camouflés derrière les jeunes révolutionnaires lors des mobilisations de juin, les perdants de 2011 reviennent aujourd'hui en grâce à tous les niveaux de l'Etat et de la société. Et donnent un parfum de contre-révolution aux récents événements.
Réconciliation. Dans le nouveau gouvernement, on ne trouve aucune figure majeure de la classe dirigeante d'avant 2011, mais un tiers des ministres (11 sur 34) a servi d'une façon ou d'une autre sous l'ancien régime. «C'est logique, dans la mesure où ce gouvernement est plus technocratique que politique», juge le politologue Clément Steuer, qui estime qu'«il faut distinguer les hauts fonctionnaires de ceux qui ont exercé un rôle directement politique». Si la plupart appartiennent à la première catégorie, au moins trois ministres ont été affiliés au Parti national démocratique (PND) de l'ancien président Hosni Moubarak. C'est le cas du ministre de l'Economie, Ahmed Galal, un ancien cadre de la Banque mondiale qui fut conseiller de Gamal Mou