On est mis sur la piste par un écho paru dans l'une des nombreuses gazettes catholiques clandestines de la province du Hebei, dans l'est de la Chine. L'article, titré «L'exorciste du village des Cinq Puits» (1), signale l'existence d'une étrange pratiquante dans l'un des bourgs qui bordent les reliefs tourmentés de la Mongolie intérieure, à 200 kilomètres à l'ouest de Pékin. Cette femme de 76 ans, surnommée la vieille tante Gu, serait dotée de pouvoirs surnaturels lui permettant de chasser le Démon. «Tous les prêtres des alentours confient leur admiration pour cette matrone qui pratique l'exorcisme avec une grande expertise depuis plus de vingt ans», explique le récit, illustré par le cas d'un éleveur «habité depuis des années par Sadan» (Satan, en chinois). Plusieurs prêtres s'étaient relayés à son chevet, en vain. «Lorsqu'on approchait un crucifix du possédé, les doigts de ses mains devenaient noirs et effilés… Mais Tante Gu jeûna et pria pendant plusieurs jours et, à force de récitations du rosaire, de formules exorcisantes et d'aspersions d'eau bénite, elle finit par le guérir.»
Un voyage vers ce mystérieux village des Cinq Puits s'imposait. Il nous mène non loin de Xuanhua (naguère appelé Süanhwa), où des missionnaires jésuites convertirent des populations entières dès le XVIIe siècle. Par la suite, des prêtres belges et français bâtirent une cathédrale et des dizaines d'églises. Beaucoup furent détruites par les ar