Dans ses discours, il n'hésite pas à employer les mots de la rue et ceux de la mosquée. Issu du peuple, ce Premier ministre aime à parler comme son peuple, ces «Turcs encore trop pauvres dans une Turquie si riche», message qu'il martèle depuis les tribunes. Le charisme de Recep Tayyip Erdogan, 59 ans, homme fort de la Turquie depuis 2002, c'est d'abord le verbe. Un orateur au parler dru, voire cru, qui dérape à l'occasion dans des invectives contre «le gang global» et le «capital juif» ou se lance dans des envolées lyriques où les références coraniques se mêlent à des paraboles sur l'histoire ottomane.
Micro en main, Erdogan est intarissable. Avec gouaille, l'ex-gamin des rues de Kasimpasa, bas quartier de la Corne d'or au cœur d'Istanbul, raconte devant des militants hilares de l'AKP, le parti islamo-conservateur au pouvoir, son refus de prendre au téléphone Mohamed el-Baradei, prix Nobel de la paix et vice-président égyptien installé par les militaires : «Comment est-ce que je pourrais parler avec toi ? Tu as été nommé par les dirigeants du coup d'Etat…» Au fil des jours, il est toujours plus virulent à condamner la répression contre les Frères musulmans, qu'il voit comme des alliés et des victimes d'un «complot» semblable à celui qu'il prétend avoir subi au printemps.
«Nous avons un rêve pour notre pays»
Ancien élève d'un imanhatip (lycée religieux destiné à former les imams), Erdogan met en parallèle les dissensions à la tête du parti et les débats entre l