Gilbert Achcar est professeur à l'Ecole des études orientales et africaines de Londres. Il est l'auteur de Le peuple veut : une exploration radicale du soulèvement arabe (Actes Sud).
Comment peut-on expliquer l’utilisation d’armes chimiques par un régime déjà sur la sellette ?
Après l'utilisation d'armes chimiques, en juin, Barack Obama avait fait un geste, motivé par ses déclarations que leur utilisation serait une «ligne rouge». Il avait donné son feu vert pour que la rébellion reçoive des armes. Celles-ci lui avaient permis de marquer des points sur le plan militaire. Le régime était donc en difficulté. Et la banlieue de Damas, précisément, est un endroit crucial pour terrasser l'adversaire. En difficulté, Saddam Hussein avait procédé ainsi.
Mais le gaz a été utilisé alors que les inspecteurs de l’ONU étaient à Damas…
C’est l’argument du régime, le seul qu’il avance. Au contraire, c’était le bon moment pour lui d’utiliser des armes chimiques : après, il pouvait plaider qu’il ne l’aurait jamais fait dans ces conditions. Et en plus, il a empêché les inspecteurs de travailler en temps utile… Avec des visites éclairs sur les lieux, comment pouvaient-ils trouver des preuves flagrantes ? Si les gouvernements occidentaux étaient à l’affût pour intervenir en Syrie, on pourrait être méfiant. Mais on voit bien qu’ils rechignent à intervenir.
Une attaque occidentale peut-elle changer le cours du conflit ?
Tout dépend des objectifs. Si les Etats-Unis détruisent l’aviation au sol, le régime sera sensiblement affaibli. Pour les autres cibles - postes de commandement, missiles… -, le gouvernement a eu le temps de les déplacer.
Obama privilégie pour la Syrie «l’option yéménite» (le président Saleh a été remplacé par son vice-président). Cela peut-il marcher ?
Je ne crois pas. En fait, les Etats-Unis ont la hantise d'un effondrement de l'