Spécialiste des conflits armés en Afrique, Marc-Antoine Pérouse de Montclos vient de codiriger la publication de l'ouvrage collectif la Tragédie malienne (éditions Vendémiaire).
Comment interprétez-vous l’attaque terroriste des shebab à Nairobi ?
Il est difficile de trancher. Est-ce le chant du cygne d’une organisation aux abois, pris en étau entre la force de l’Union africaine déployée sur place, l’Amisom, et les militaires kenyans présents dans le sud de la Somalie ? Ou, au contraire, le signe d’un repositionnement stratégique du mouvement dans les pays voisins sous l’effet de sa dispersion contrainte et forcée ? Indéniablement, la communauté internationale a marqué des points dans la capitale, Mogadiscio, où des hôtels ont rouvert, et même - pour la première fois en vingt ans - des ambassades. Mais dans le sud de la Somalie, elle marque le pas en raison de la profonde fragmentation de cette zone aux mains de diverses factions. Quoi qu’il en soit, l’opération spectaculaire des shebab à Nairobi envoie un signal très clair à la communauté internationale : ils existent encore et demeurent actifs. Leur capacité de nuisance est réelle.
Cet événement marque-t-il l’échec de la stratégie du Kenya vis-à-vis de leur voisin ?
Nairobi a envoyé des troupes en Somalie en 2011, suite à plusieurs enlèvements et attaques menées sur son territoire par les shebab. Des humanitaires avaient été kidnappés et une Française tuée. Mais en intervenant militairement pour se constituer une sorte de glacis, le Kenya a pris le risque de s'enfoncer dans un bourbier. Son armée n'est pas très aguerrie. Et cette intervention est très mal perçue dans l