Elle se croyait une victime, elle se retrouve en position d'accusée risquant jusqu'à trois ans de prison. Il y a une dizaine de jours, Pinar T. a appris qu'elle était inculpée de «rébellion à agent de la force publique», comme de nombreuses autres personnes interpellées, très souvent au hasard, lors des manifestations antigouvernementales du printemps, place Taksim à Istanbul, pour la défense du parc Gezi - menacé par un projet immobilier. Embarquée loin de toute manifestation alors qu'elle attendait un minibus le 2 juin en début de soirée, traînée dans un car municipal transformé en fourgon cellulaire, la jeune femme diplômée en pédagogie et travaillant dans le tourisme a été insultée, battue et menacée de viol par les policiers qui l'ont forcée à se déshabiller. «Je te mettrai à quatre pattes, je t'enculerai et personne n'en saura rien», lui lança un des flics la traitant de «pute» et lui serrant le cou. Son témoignage est conforté par ceux d'au moins deux autres personnes.
A peine libérée de sa garde à vue, elle a porté plainte. Sans résultat jusqu’ici. Mais elle devra, elle, rendre des comptes devant la justice. De telles mises en accusation tardives à l’issue de procédures opaques sont très banales. Or le cas de Pinar est tellement caricatural qu’il a choqué l’opinion, alors même que les inculpations ou les sanctions professionnelles visant les manifestants interpellés, des membres des organisations de la société civile qui ont appuyé le mouvem