C'est il y a un peu plus de quarante ans, donc il y a un siècle. Dans le Chili de Salvador Allende, un homme, un parmi d'autres, prend des photos des mineurs, des foules, de l'entourage du président socialiste, élu le 3 novembre 1970. Il s'appelle Guillermo Saavedra et il est membre du MIR (Mouvement de la gauche révolutionnaire). En 1964, il s'est occupé de la sécurité du candidat Allende. Ensuite, il a travaillé pour le quotidien Clarin et le journal du MIR, le Rebelle, dont il était cofondateur. Ceux qui l'ont connu à cette époque se souviennent qu'il prenait sans cesse des photos. On l'appelait alors «Buffalo» - chacun, à l'extrême gauche, avait un surnom de lutte ou de guerre. Après le coup d'Etat du 11 septembre 1973, comme tant d'autres, il rejoint la clandestinité.
Laissé pour mort
Saavedra échappe aux militaires et, condamné par la junte, parvient à prendre l’avion, sous la protection de l’ambassade de France. A cette époque, plus de 10 000 Chiliens rejoignent l’Hexagone d’une façon ou d’une autre, avec ou sans escales, pour échapper à la mort ou aux prisons de Pinochet. Généralement, des villes communistes les accueillent.
Guillermo Saavedra habite toujours à Paris, où il dirige la Chambre de commerce du Chili. Ces photos, il les avait perdues, et même oubliées. Une boîte pleine de négatifs avait été remise avant sa fuite, explique-t-il, à l'un de ses cousins, dont la maison est perquisitionnée. Laissé pour mort parmi d'autres fusillés, son cousin sera sauvé et soig