Les préjugés concernant les populations minoritaires en Europe se portent décidément bien. L'affaire de «l'ange blond» et sa couverture médiatique montrent une fois de plus à quel point ils sont ancrés dans notre inconscient collectif et combien ils sont prégnants, bien que l'histoire nous eût appris quelles furent leurs terribles retombées au cours du XXe siècle. Cette affaire est scandaleuse à plus d'un titre, mais pas pour les raisons initialement données par les autorités grecques, comme cela l'a été dit par plusieurs commentateurs. Il s'agit surtout du scandale de l'ignorance, de l'effarante bêtise concernant notre passé. C'est sur ce point qu'en tant qu'anthropologue je souhaite intervenir. D'autant que les anthropologues ont une écrasante responsabilité dans l'histoire génocidaire du IIIe Reich allemand, ainsi que dans la perception négative qui demeure encore aujourd'hui.
Précisons d’emblée que la marginalisation et la persécution de la population que l’on nomme aujourd’hui «rom» (Tsigane, Sinti, Bohémien…) est bien antérieure en Allemagne et dans toute l’Europe à la prise de pouvoir par les nazis en 1933. Il existait avant cette date des registres répertoriant notamment les personnes mobiles considérées comme nomades. Avec le régime nazi, le recensement fut systématique. Il s’agissait, pour les nazis, confrontés à une population indo-européenne d’origine indienne, d’en évaluer le degré de «sang étranger» et donc «d’aryanité». Mais c’est avec l’a