C’était un ami, un très vieil et très proche ami.
J’ai tellement aimé et admiré Tadeusz Mazowiecki que je ne pouvais qu’être heureux, dimanche, de voir l’émotion populaire qui accompagnait ses obsèques nationales, les foules venues s’incliner la veille devant sa dépouille, ces drapeaux en berne et les écrans de l’aéroport qui affichaient tous son portrait d’homme doux et grave, marqué par tant d’épreuves et de combats.
Citoyens anonymes et corps constitués, la Pologne a panthéonisé Tadeusz avec la même ferveur qu’elle l’avait fait, il y a plusieurs années déjà, pour Jacek Kurón et Bronislaw Geremek, deux autres des grands héros de sa liberté.
Elle l’a fait avec d’autant plus de solennité que c’était également le premier Premier ministre non communiste du bloc soviétique qu’elle enterrait là, un résistant porté au pouvoir trois mois avant que le mur de Berlin ne fût tombé et dont l’investiture avait précipité la fin du soviétisme. C’est ce que rappelaient le drapeau sur son cercueil et les salves tirées en son honneur mais, aussi justifiée qu’elle fût, cette pompe ne pouvait rien dire des enseignements de la vie de Mazowiecki.
On pourrait croire que la liberté polonaise remonte aux grandes grèves d’août 1980 et à la naissance de Solidarité. C’est largement vrai puisque, cinq ans avant la pérestroïka de Mikhaïl Gorbatchev, la légalisation du premier syndicat indépendant du monde communiste fut le premier des deux grands ébranlements qui ont mis fin à l’Empire soviétique.
Comme cons