Cinq jours après, la ville de Tacloban, dévastée par le typhon Haiyan, est toujours laissée à elle-même. On y accède après quatre heures de route depuis Ormoc, un port situé à une centaine de kilomètres, dans le sud-ouest de l'île de Leyte. Au milieu d'un paysage de palmiers décapités, de stations-service barricadées et de maisons dépouillées, on croise des processions de cercueils portés sur des brancards, des triporteurs ployant sous le poids de leurs passagers. Mais pas le moindre convoi humanitaire, ni même un seul véhicule d'assistance. Dans le sens inverse, des réfugiés s'entassent dans des camions à benne, la tête recouverte de serviettes-éponges pour se protéger de l'étourdissant soleil tropical, avec le peu de choses qu'ils possèdent encore. La foule se presse sur une route dégagée des arbres qui faisaient obstacle voilà encore deux jours. «Si ça continue, tout le monde va partir et Tacloban deviendra une ville fantôme, dit Colin Sedaria, un étudiant en technologies de l'information. Les habitants réfugiés dans les centres d'évacuation peuvent se nourrir un peu, mais les autres passent leurs journées à grappiller ce qu'ils trouvent dans les rues et les ruines.»
Dépouilles. A Tacloban, on est accueilli par l'odeur des cadavres en décomposition. Elle flotte partout. En face de la mairie, en bord de mer, une trentaine de dépouilles dans des sacs ont été placées dans un jardin, curieusement en plein soleil.