Menu
Libération
Reportage

«Les talibans me tueront un jour, j’en suis persuadé»

Article réservé aux abonnés
En quittant l’Afghanistan l’an dernier, la France a laissé derrière elle les habitants qui l’avaient soutenue. Ils se retrouvent aujourd’hui pris pour cibles par des extrémistes qui ont de nouveau le champ libre.
Des soldats français préparent leur départ d'Afghanistan sur la base Nijrab, le 20 novembre 2012. (Joris Fioriti /AFP)
publié le 15 décembre 2013 à 19h16
(mis à jour le 16 décembre 2013 à 12h07)

Les deux lettres sont à en-tête et dûment tamponnées. La première est signée de Qari Marjan, chef taliban d’Uzbin, la vallée où dix soldats français ont été tués en août 2008. La seconde du général Jean-Pierre Palasset, en poste en Afghanistan jusqu’en avril 2012. Gul Mohammed (1) les conserve dans une pochette en plastique où sont dessinées des fleurs rouge et bleu. Il ne les sort que rarement. Il sait qu’elles décideront de son avenir.

Dans la première, déposée une nuit devant sa porte, les talibans le menacent dans leur style habituel de lui «trancher la gorge pour avoir travaillé comme espion des Français et avoir assuré leur propagande». «Tu ne seras pas pardonné pour tes crimes», ajoutent-ils. Dans la seconde, le général français le félicite «pour ses belles qualités intrinsèques et son profond professionnalisme». Il le remercie également d'avoir «fait preuve de la plus grande des collaborations» avec l'armée française, qu'il a aidée depuis 2009 en organisant des rencontres avec les notables du district de Surobi, à une cinquantaine de kilomètres à l'est de Kaboul.

Traîtres. Ces deux lettres, Gul Mohammed les a ajoutées à son dossier de demande de visa pour la France rempli l'an dernier. Il n'a pas eu de nouvelles depuis. «J'avais compris que ceux qui avaient travaillé avec les militaires français et qui étaient menacés pourraient se réfugier en France. Mais peut-être votre gouvernement n'a-t-il pas encore voté cette loi ?» deman