Fernando Vallespín est professeur de sciences politiques à l’Université autonome de Madrid, après avoir dirigé le Centre d’investigations sociologiques jusqu’en 2008.
Que pensez-vous de ce projet de loi sur l’avortement ?
C’est à la fois une réforme prévisible et surprenante. Prévisible parce que le Parti populaire n’a jamais fait mystère de sa position dans ce domaine. C’est un retour à ses origines, à la législation d’il y a trois décennies où le fait d’avorter était considéré comme un délit. Surprenante, aussi, de par le radicalisme de cette réforme : obstacles supplémentaires pour une telle opération ; mépris des souhaits de la femme et prise en compte, en revanche, du droit des non-nés ; crible médical renforcé… On se retrouve projeté très en arrière, dans une Espagne obscurantiste. Ils montrent vouloir détricoter point par point l’héritage de Zapatero quant à ses réformes sociétales, et c’est d’autant plus ridicule que la majorité des Espagnols les avaient pleinement acceptées.
Cela montre-t-il une droitisation de l’exécutif ?
Il y a un coup de barre idéologique à droite. Je pense qu’on peut distinguer deux temps. Le premier, ce fut la période technico-administrative correspondant à la gestion de la crise : les coupes budgétaires, la lutte contre le déficit public, autant de sacrifices imposés par l’Union européenne et par l’Allemagne. On est entré dans le deuxième temps, celui de l’idéologie. Dans le fond, je crois qu’on assiste à une dérive autoritariste, à une patrimonialisation du pouvoir de la part du Parti populaire. Leur calcul est qu’ils disposent de la majorité abs