De la cathédrale de briques rouges de Bangui, une clameur s’élève : des chants joyeux, des rires, des applaudissements enthousiastes qui envahissent tout le quartier, prenant tout à coup le pas sur le claquement des balles auquel les Banguissois sont habituellement résignés.
C’est la messe de minuit, qui cette année a lieu à 15 heures, couvre-feu oblige, et la cathédrale est pleine à craquer. Dieudonné Nzapalainga, le célèbre archevêque de Bangui, entame un long prêche, qui tient plus du discours politique que du discours religieux. En ces temps difficiles, il est impossible de ne pas évoquer les exactions, massacres, viols et lynchages qui font le quotidien des Centrafricains.
Tantôt en français, tantôt en Sango, la langue nationale, il harangue la foule qui répond par des applaudissements appuyés: il parle de paix et de réconciliation : «Il faut libérer la parole, crier d'une seule voix "plus jamais ça" !». «Il n'y a pas de paix sans justice (...) soyons des artisans de justice et nous serons des artisans de paix», assène-t-il aux fidèles. Devant la cathédrale, la réalité se rappelle à eux : assis dans la poussière, arme au poing, des soldats sont là pour sécuriser l'office.
«La paix, on va l’avoir !»
«Je travaille, mais je prie aussi», explique l'une des sentinelles, tout en écoutant la voix de l'archevêque qui grésille dans les haut-parleurs de la cathédrale. «On dit que la Centrafrique est oubliée de Dieu, mais Dieu n'oublie personne, ici comme ailleurs... la paix, on