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Libération
Reportage

A Boali, Sangaris face au lynchage des musulmans

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Les soldats français protègent des civils réfugiés dans l’église du village centrafricain pour fuir des chrétiens déchaînés. «Libération» a assisté à ce déferlement de haine.
Des musulmans blessés ce week-end dans le village de Boali, à 95km au nord de Bangui, en Centrafrique. (Photo Maria Malagardis)
publié le 19 janvier 2014 à 21h36

«Pose ton arme !» hurle le soldat français en progressant avec prudence au milieu du vaste terrain vague qui sert d'esplanade à la paroisse Saint-Pierre. Face à lui, un jeune homme affublé d'une étrange perruque, le torse bardé de grigris, avance, se détachant ainsi du groupe qui vient d'apparaître aux abords de l'église : des hommes aux tenues bariolées, comme des clowns macabres, sautillent tout surexcités en exhibant leurs bâtons. Mais seul le jeune homme à la perruque blonde possède apparemment une arme à feu. Il hésite un instant à lâcher son fusil, puis le pose à terre en reculant prudemment, sans cacher sa rage.

Cauchemar. Au même moment, des tirs retentissent, ils viennent de la rue commerçante, juste à l'entrée de l'église. La tension est montée brutalement, sans s'annoncer, ce vendredi après-midi à Boali, baptisée «la resplendissante», selon le panneau affiché à l'entrée de cette bourgade située à 95 kilomètres au nord-ouest de Bangui, la capitale centrafricaine. Ce jour-là, deux détachements de l'opération Sangaris, les soldats français déployés en Centrafrique, appuyés par trente militaires congolais de la Misca, la force africaine en place dans le pays, s'y trouvent. Ils n'auraient dû faire que passer dans cette localité, simple étape pour leur mission du jour : démanteler les barrages sur la route du nord-ouest et désarmer les groupes qui les tiennent. Mais toute incursion dans le vaste no man's land qui se