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Libération
Reportage (1/3)

Israël aux petits joints pour ses malades

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Avec 11 000 patients autorisés à consommer de l’herbe, l’Etat hébreu est le deuxième prescripteur au monde de marijuana thérapeutique. Histoire en trois volets d’une pratique en plein essor dans un pays opposé à la légalisation de l’usage récréatif.
publié le 20 janvier 2014 à 18h06

De chaque côté de l'avenue Ben-Gourion, qui descend droit vers la mer à l'exact aplomb du temple Bahaï et de ses jardins persans, des rennes tirent leur traîneau, tout en guirlandes lumineuses, sous le soleil de décembre. C'est là, dans l'un de ces cafés du quartier arabe chrétien de Haïfa, à l'ombre d'un immense père Noël gonflable, qu'on a retrouvé Barak Abutbul - blouson, cheveux courts - et sa sœur aînée, Sivan. Elle lui tiendra la main, parfois, lorsqu'il suspendra son récit, la gorge nouée. «Longtemps, je n'ai pas pu raconter», dit-il. Barak a 24 ans, des éclats de mortiers dans le bras gauche et un syndrome de stress post-traumatique. Il est l'un des 11 000 Israéliens détenteurs d'une autorisation de consommation de cannabis à titre médical.

C'était le vendredi 7 janvier 2011, vers 18 heures. Nuit noire sur une colline surplombant la frontière avec Gaza. Barak Abutbul finissait ses trois ans de service militaire, encore un mois et retour au civil. Sa brigade repère trois Palestiniens armés qui semblent installer des explosifs le long de la barrière de sécurité. Ordre de sauter de la voiture. «J'avais tout mon barda de sniper, c'était lourd. Un copain m'a aidé à me coucher par terre. Il est mort.» Silence. «J'ai senti des impacts sur mon bras. Mon commandant avait le visage en sang, il respirait vite. J'ai pensé : je dois le regarder en face, lui dire ça va aller. Il crachait du sang. Ensuite, j'ai eu cette image tout le temps.» Vingt minutes