Les Noirs sont au sud, les Blancs au nord : aujourd'hui encore, sur une carte de Little Rock, la capitale de l'Arkansas, il est facile de distinguer les quartiers. Même Brian Schwieger, guide du musée de Central High School, consacré à la déségrégation raciale, fait le dessin à gros traits : «C'est simple, au nord de l'Interstate 230, vous avez les quartiers blancs et au sud, les Afro-Américains. En ville, on dit même que l'autoroute a été construite, dans les années 60, pour servir de frontière.»
En plein cœur de Little Rock, le musée commémore la bataille qui a dû être menée en 1957 pour intégrer les premiers élèves noirs dans ce lycée public, jusqu'alors exclusivement blanc. Il avait fallu déployer l'armée fédérale pour escorter ces neufs lycéens et les protéger des agressions de leurs camarades blancs. L'année suivante, le gouverneur de l'Arkansas avait même préféré fermer tous les lycées publics de la ville plutôt que d'y accepter des Noirs. Le musée montre des bouts de papier que les élèves s'échangeaient durant l'année scolaire 1957-1958 : «Bon pour botter la croupe de chacun des nègres de Central High une fois par jour», disait l'un. «Un de moins, il en reste huit», notait un autre après l'expulsion de l'un d'eux. «Nous avons passé toute l'année dans la terreur psychologique, se souvient Terrence Roberts, un des neuf intégrés de force à Central High en 1957. Nous étions bons élèves, mais cette année-là fut surtout pour nous une