L'avenir de ce qui restait de médias libres en Russie est incertain. Depuis quelques jours, Dojd, une chaîne privée indépendante qui critique librement le pouvoir depuis sa création, en 2010, est attaquée. Mercredi, la diffusion a été suspendue par plusieurs opérateurs presque simultanément et sous divers prétextes (contrats expirés, problèmes techniques) après que la Douma (le Parlement russe) a condamné à l'unanimité un sondage paru à l'antenne le 26 janvier. Question : «Aurait-il fallu livrer Leningrad [aux nazis] pour sauver des centaines de milliers de vies ?» Sous-entendu, en évitant ainsi le siège de la ville pendant neuf cents jours, qui a fait plus d'un million de morts. Les députés ont crié au «blasphème» et à une atteinte à la mémoire des anciens combattants. Le thème de la Seconde Guerre mondiale est sacré en Russie, et la moindre allusion à une quelconque relecture des faits ou remise en question de la mémoire officielle provoque toujours un tollé. Mais, selon la direction de Dojd, ses journalistes et des observateurs indépendants, le sondage n'a fait que servir de prétexte pour déclencher une offensive contre un média qui dérange.
Dojd, «la chaîne optimiste», a pris son envol pendant les grandes manifestations anti-Poutine de 2011-2012, qu'elle a couvert avec tellement d'enthousiasme qu'elle a vite été classée média dissident. Toutefois, l'objectif affiché de la chaîne est de faire du «journalisme professionnel», contrairement