Son regard endormi et son survêtement rouge ont fait le tour de la Toile. Un vendredi matin, fin décembre, Mohammad el Chaar, 16 ans, discute avec ses amis sur un coin de trottoir près du centre-ville de Beyrouth. Les adolescents immortalisent l'instant en se prenant en photo. Une minute plus tard, une bombe vise Mohamad Chatah, un conseiller de Saad Hariri, proche de l'opposition syrienne. Le souffle de l'explosion projette l'adolescent sur le bitume. Une seconde photo, prise quelques minutes plus tard, le montre gisant dans une mare de sang. Il ne survivra pas à ses blessures.
En quelques heures, Mohammad el Chaar devient un «martyr», au même titre que la personnalité politique assassinée. Son enterrement vire à la démonstration partisane. Le cheikh qui prononce le sermon funéraire accuse le «régime syrien criminel» et le «Parti du diable» (le Hezbollah) d'avoir commandité l'explosion, choquant une partie de l'assemblée qui refuse toute politisation.
Trois jours plus tard, une autre bombe explose dans la banlieue sud de Beyrouth, un fief du Hezbollah. Ali Khadra, 17 ans, parti faire une course en scooter, est pulvérisé par 20 kg de TNT. Le Front al-Nusra, un groupe jihadiste syrien, revendique l’attentat, pour punir le «Parti de Dieu» de son soutien à Bachar al-Assad. Une nouvelle fois, les funérailles de l’adol