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Libération
Reportage

Le «rolezinho» secoue le Brésil blanc

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Le phénomène des virées de jeunes des favelas dans de luxueux centres commerciaux inquiète les autorités et les clients aisés, tout en soulignant les tensions sociales qui persistent dans le pays.
Un rolezinho, le 19 janvier à Rio de Janeiro devant un centre commercial qui, effrayé, avait fermé ses portes. (Photo Ricardo Moraes. Reuters)
par Chantal Rayes, Correspondante à São Paulo
publié le 5 février 2014 à 19h56

L'ambiance est festive, loin de la polémique qui agite l'été brésilien. Aujourd'hui, le rolezinho,«petit tour» de la jeunesse, majoritairement de couleur, qui vient des banlieues brésiliennes, se tient dans un parc de São Paulo. Et non  dans les «shoppings» de la capitale économique du Brésil, ces centres commerciaux qui en ont été le théâtre, avec fracas, au cours des dernières semaines. Le nombre de ces virées de jeunes des favelas pour danser le funk, draguer, boire de la bière et occuper bruyamment l'espace s'est multiplié depuis les fêtes de fin d'année. Des réunions qui inquiètent les consommateurs, les commerçants et les autorités.

Le choix du parc est destiné à éviter la répression policière ou d'autres mesures de rétorsion visant les jeunes qui s'aventureraient à nouveau en bande dans ces établissements. «Ici, au moins, on est tranquille, pas de risque de se faire jeter dehors !» dit Taís, 14 ans. Acné et bagues dentaires, l'adolescente a deux rolezinhos au compteur. «On y va pour s'éclater, se faire des amis, rouler des pelles, raconte-t-elle. C'est vrai qu'il y a pu avoir des débordements, mais de là à nous mettre tous dans le même sac… Pour eux, nous autres de la periferia sommes tous des bandits.» Eux, c'est la clientèle aisée, blanche donc, des centres commerciaux, prise de panique face au déferlement de centaines, voire de milliers de jeunes défavorisés dans ces temples de la consommation.