Heureux d'être en vie. Sous un soleil timide, des dizaines de milliers de personnes erraient vendredi, hagardes et stupéfaites, sur Maidan Nezalezhnosti, la place de l'Indépendance à Kiev. Elles semblaient loin les menaces d'assaut imminent de la police. «Là, présentement, nous avons encore remporté une bataille», se félicitait Andry, retraité, un des nombreux vétérans d'Afghanistan qui contribuent à assurer la sécurité du camp. «Les policiers se sont retirés, il n'y a plus de troupes d'assaut dans les environs. C'est la quatrième fois que nous les repoussons depuis début décembre ! Mais cette fois-ci, le bilan est désastreux, je suis horrifié.» Selon le ministère de la Santé, 77 personnes ont perdu la vie depuis le début des affrontements meurtriers, mardi. Parmi eux, 11 policiers, le reste étant des civils, protestataires antigouvernementaux.
En même temps qu'une fatigue extrême, c'étaient bien la torpeur et l'incompréhension qui se lisaient sur de nombreux visages. Ici et là, des petites chapelles et mémoriaux avaient été érigés, recouverts de bougies et de fleurs, exhibant les photos de quelques-unes des victimes. «On ne peut pas encore faire de grand mémorial pour tous ces morts, il y en a eu trop», sanglotait une femme, le visage rougi de larmes, debout devant un des points de recueillement. Une grande messe œcuménique a été célébrée dans l'après-midi, en guise d'enterrement des victimes, dans un silence grave.
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