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Homosexualité : l’étau indien

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La dépénalisation aura duré cinq ans. Sous la pression des religieux, l’Inde vient de recriminaliser les relations gays. Les associations LGBT et de lutte contre le sida s’alarment des conséquences sanitaires et sociales.
publié le 28 février 2014 à 17h06

L'immense guirlande de ballons s'est coincée dans le réseau de fils électriques de la rue. Près de la station Grant Road, dans le sud de Bombay, le cortège s'ébranle malgré tout, armé de drapeaux arc-en-ciel. Drag-queens en talons hauts, transsexuels vêtus de saris éclatants, hommes et femmes grimés qui dansent joyeusement au son des tambours, et même une femme âgée brandissant son panneau «Je suis fière d'être la mère d'un enfant gay»… Au milieu de la circulation intense, la Gay Pride se fraie un passage, escortée par des policiers. L'événement est très politique cette année : la Cour suprême de l'Inde vient de recriminaliser l'homosexualité. Certains manifestants gardent d'ailleurs leur visage prudemment masqué par un foulard. Les passants se figent pour observer l'étrange défilé. Malik, boutiquier, déclare : «Chacun peut bien vivre comme il veut. Tous les citoyens ont des droits, il est normal de se battre pour les obtenir. Moi, je les soutiens !» Tishar, un agent immobilier, commente : «Je ne crois pas que ce soit un crime, mais c'est contre-nature.» Mohammed, étudiant, est, lui, catégorique : «L'homosexualité, c'est contre la religion, contre la loi, contre la culture, c'est un danger.»

De l’amende à la perpétuité

Les homos pensaient avoir enfin tourné la page de cette époque sombre où ils étaient considérés comme des criminels dans leur propre pays. L'article 377 du code pénal, introduit par les Britanniques en 1860, punit en effet les «relations charnelles