Il y a eu des progrès : 16,5% des membres du Congrès libyen élus en 2012 étaient des femmes, et depuis février, une loi reconnaît les femmes violées pendant la révolution et sous Kadhafi comme des «victimes de guerre». En outre, l’activiste féministe Alaa Murabit a reçu, en décembre, le prix de la Fondation Trust Women.
Mais il reste pourtant un lieu dans lequel les Libyennes ont du mal à s'imposer : la rue. «J'avais l'habitude de marcher avec ma mère. Maintenant, c'est impossible sans entendre des réflexions de la part des hommes», soupire Estibrak Twat, jeune militante de Phoenix, une association pour les droits des femmes à Tripoli. A ses côtés, son amie Aïcha Choukri renchérit : «Ils peuvent le faire car la rue leur appartient. Et tu n'as pas intérêt à répondre.» En l'absence de véritable police, ce sont toujours les membres de brigades qui occupent le pavé, des jeunes hommes sans travail stable, armés, et souvent sous l'emprise de la drogue ou de l'alcool. Enas, 23 ans, étudiante, ne marche jamais dans la rue et ne prend pas le taxi. Pour faire son shopping ou boire un café, elle appelle son père qui joue les chauffeur-garde du corps. La rue est un territoire à reconquérir. «Durant la révolution, nous étions partout : à la cuisine, au front, dans les hôpitaux. Tout ça pour qu'ensuite mon fils, qui a 17 ans, refuse de m'accompagner dehors car je me fais draguer», soupire Aïcha al-Magrabi, féministe, poète et l'une des rares Libyennes non voilées