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«Les réfugiés ont autant peur de l’armée que de Boko Haram»

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Les villages du Niger proches de la frontière accueillent des dizaines de milliers de personnes qui fuient les tueries des islamistes ou les représailles des militaires au Nigeria.
Le 2 mars à Maiduguri, au lendemain d'attaques meurtrières ayant fait au moins 35 morts. (Photo Stringer. AFP)
publié le 11 mars 2014 à 19h16
(mis à jour le 12 mars 2014 à 11h30)

La rivière Komadougou, en cette saison, c'est un liquide roux, trois mètres au plus large et 80 cm de profondeur. La Komadougou, pendant les pluies, mouille la région et se jette dans le lac Tchad. Ici, elle sépare Bosso, ville du Niger d'environ 10 000 habitants, du Nigeria. C'est la plus molle et la plus franchissable des frontières. Aucune présence de l'armée côté Nigeria. Côté Niger, la troupe sillonne la ville. Les réfugiés affluent depuis février 2013 de l'Etat voisin de Borno. Le Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) travaille depuis septembre au recensement des populations nigérianes qui ont fui leur pays et les estime aujourd'hui à plus de 2 000 à Bosso et plus de 40 000 sur la région de Diffa. «Un chiffre largement dépassé et qui annonce une situation alimentaire préoccupante», indique Karl Steinacker, le représentant des Nations unies au Niger.

Cruelle. Le préfet de Bosso, Aboubakar Hamadou Marah, a le front plissé par l'inquiétude : «Nous savons qu'il y a des éléments de Boko Haram dans la ville. Tout le problème est de savoir qui est qui.» Il y a trois semaines, la secte islamiste a attaqué l'île de Mandaï, en territoire nigérian, sur le lac Tchad. Deux jours plus tard, l'armée du Nigeria, qui a pris possession de l'île et voyant que deux maisons avaient été épargnées, celle de l'imam et du chef traditionnel, «a exécuté les deux hommes en représailles, les soupçonnant de collaboration avec la secte»,