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Libération
TRIBUNE

«Ce matin, la guerre n’avait toujours pas commencé, j’avais mal dormi…»

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Depuis le balcon de sa maison, l'écrivain ukrainien Andreï Kourkov a été un témoin privilégié du Mouvement du Maidan, de l’espoir suscité par les premières manifestations à la répression de février.
par Andreï KOURKOV, Ecrivain
publié le 19 mars 2014 à 18h36

J’habite à cinq cents mètres du Maidan. Depuis mon balcon, on peut apercevoir les bulbes du clocher de la cathédrale Sainte-Sophie. Quand des amis viennent chez moi, je leur montre ces symboles de l’antique cité de Kiev. Mais, ces derniers mois, mes amis d’autres villes et d’autres pays ne viennent plus à Kiev. Et du haut de mon balcon je regarde souvent la fumée qui s’élève au-dessus du centre de la ville. Cette fumée est devenue le nouveau symbole de Kiev, et de l’Ukraine tout entière. Noire, épaisse - celle de pneus de voitures enflammés. Bizarrement, jamais la fumée des protestations n’était parvenue jusqu’à chez nous. Le vent l’emportait toujours du côté du quartier gouvernemental. Jusqu’à ce mercredi 19 février.

Jeudi 20 février

Hier, cette fumée a cédé la place à des flammes : un grand immeuble brûlait sur la place centrale de Kiev, un bâtiment édifié à l'époque soviétique pour abriter le comité central de tous les syndicats. Il était occupé depuis deux mois par les protestataires. On y avait installé un hôpital pour les blessés, plusieurs milliers de personnes y ont passé la nuit, arrivées d'autres régions pour manifester. Hier, les «berkoutovtsy», les forces antiémeute, s'en sont emparé, et peu après l'incendie s'est déclaré. Un député de l'opposition, Sergueï Sobolev, a annoncé qu'il s'y trouvait plus d'une centaine de manifestants grièvement blessés, et que seule la moitié d'entre eux avaient pu être évacuée avant que le feu embrase tous le