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«Eh bien, bonne nuit»

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Dix jours se sont écoulés depuis la disparition de l’appareil, laissant un vide que les mots peinent à combler.
par Hélène Gaudy
publié le 19 mars 2014 à 21h26

Les disparitions emballent les imaginaires, surtout celles des équipages en déroute, des trajectoires inconnues, des vaisseaux et des avions fantômes. Il y a eu ce vol de la compagnie Helios Airways du 14 août 2005, dont les membres de l’équipage et les passagers avaient perdu connaissance tandis que l’appareil volait en pilote automatique avant de s’écraser dans les environs d’Athènes. Il y a eu ces hommes de l’équipe de rugby de Montevideo, réduits au cannibalisme parce que la carcasse de leur avion était restée soixante-douze jours dans les Andes enneigées avant d’être retrouvée.

C’était au début des années 70. Aujourd’hui, en 2014, le territoire comme l’espace aérien semblent quadrillés, connus jusque dans leurs moindres replis. On écoute les conversations téléphoniques des autres, on regarde, à l’autre bout du monde, le visage de nos interlocuteurs sur un écran d’ordinateur. Selon leurs proches, les portables de plusieurs passagers auraient continué à sonner et certains seraient restés connectés aux réseaux sociaux, ce qui maintient, même ténue et fragile, la possibilité d’un lien. Chaque image, chaque portion de réel semble bénéficier d’une netteté presque inquiétante, alors comment imaginer qu’un Boeing puisse, purement et simplement, disparaître ?

Radars. Les mots du vide, de l'absence, envahissent les colonnes des journaux, habituellement saturées de données «objectives». Selon l'AFP, on a d'abord «perdu le contact».