Dans l’ancienne usine de coton de la ville de Grimari, les combats du matin ont laissé des traces sur les visages des ex-rebelles de la Séléka. Les yeux de ces hommes, souvent jeunes, sont teintés d’excitation et de fébrilité. Ils respirent vite en tenant fermement leurs armes. Celles-ci prolifèrent dans ce camp de fortune. Grimari est devenu le territoire de ces combattants musulmans en grande majorité, et c’est aussi l’une des principales portes d’entrée vers l’est de la Centrafrique qu’ils détiennent toujours.
La capitale, Bangui, et l’ouest du pays sont déjà tombés depuis début décembre aux mains armées de machettes, de fusils de chasse et de grenades des miliciens chrétiens anti-balaka. Les ex-rebelles refusent que la digue cède ici. Ils ont donc repoussé l’ennemi à grand renfort de lance-roquettes et de tirs nourris à l’entrée de la ville. Ces combats ont instantanément vidé les quartiers. Des milliers d’habitants se sont installés à la hâte dans les bâtiments de la mission catholique, créant un camp de déplacés qui - les pères italiens de la paroisse en sont sûrs - est là pour longtemps tant la peur est dorénavant ancrée.
Épuration. La veille, Grimari ne portait pourtant aucun stigmate de la guerre civile qui oppose les ex-rebelles de la Séléka (à l'origine d'un coup d'Etat en mars 2013) aux miliciens chrétiens déterminés à les chasser. Leur affrontement rejaillit sur les populations et conduit à une épuration confessionnelle sans p