Crise économique, institutionnelle, sociale… L'Union européenne semble plus que jamais dans l'impasse. Raffaele Simone, professeur de linguistique à l'université de Rome, analyse les causes de cet état dépressif. En 2010, il avait publié chez Gallimard le Monstre doux : l'Occident vire-t-il à droite ? (1) Cette analyse décapante sur le triomphe de l'idéologie de la consommation et du divertissement dénonce l'incapacité de la gauche à formuler un grand projet à la hauteur de son temps.
Comment définir la crise actuelle de l’Europe ?
Elle est avant tout due au fait que les citoyens européens ont commencé à percevoir l’existence de cette entité. Longtemps, l’Europe a seulement été une étiquette, elle n’avait pas vraiment de contenu. Aujourd’hui, la population ressent son existence et en distingue les défauts plus que les avantages. Pour le citoyen ordinaire, le seul intérêt de l’Europe, c’est la possibilité de circuler librement. Pour d’autres catégories de personnes, c’est de faire circuler le capital ou de créer des entreprises sans obstacles. Les défauts sont en revanche nombreux, à commencer par l’euro, qui a appauvri plus de la moitié des citoyens européens. Et une bureaucratie européenne quasiment céleste, extrêmement bien rémunérée, privilégiée et repliée sur elle-même. Quant à la démocratie, elle est très lacunaire. Une fois que les citoyens ont voté pour le Parlement de Strasbourg, ils n’ont plus aucun moyen d’intervenir. L’UE compte encore très peu au niveau international et elle subit l’hégémonie de Berlin