En 1986, lorsque le Portugal adhère à l’Union européenne (UE), le mot même d’Europe semble revêtir une nouvelle signification dans le lexique collectif des Portugais. Plus qu’un espace géographique, qu’une identité culturelle, qu’un projet politique, l’Europe devient le grand dessein national. Il faut y employer toutes les énergies et y placer toutes les espérances.
Les principaux objectifs de la révolution d’avril 1974 étaient atteints, mais la démocratie coïncidait également à la fin d’un Empire colonial qui, au long de cinq siècles, avait essaimé en Afrique, en Amérique du Sud et en Asie.
L’affirmation des Portugais dans le monde s’était surtout construite en dehors des frontières continentales, et désormais à nouveau confinés dans un petit territoire à l’extrême ouest du Vieux Continent, il nous semblait enfin venue l’heure de devenir européens.
C'était quoi être européen ? C'était avant tout retrouver le sentiment d'appartenir à un espace qui, en dépit de la sanglante première moitié du XXe siècle, restait toujours le grand modèle de civilisation capable d'inspirer le reste du monde. Avec ce sentiment d'appartenance, notre ambition d'accéder à des niveaux de développement semblables à ceux des Français, des Allemands, des Hollandais, des Anglais, était légitimée. La solidarité entre des peuples si divers - l'une des fondations sur laquelle semblait reposer le projet européen - nous assurait la certitude que nous étions tous sur le même bateau, que l'on soit du N