Une nuit, Abdel Fatah al-Sissi rêve qu’il discute avec Anouar el-Sadate. L’ancien chef de l’Etat, assassiné en 1981, lui confie avoir toujours su qu’il serait président. «Moi aussi, je dirigerai l’Egypte», lui répond Al-Sissi. Cette «vision», qui date d’il y a une trentaine d’années, il l’a racontée à l’automne à un journaliste du quotidien Al-Masry Al-Youm. Elle est finalement devenue réalité. A 59 ans, l’ancien chef de l’armée succède au président islamiste Mohamed Morsi, qu’il a renversé le 3 juillet. Lors du scrutin des 26 et 27 mai, il a été élu avec quelque 96% des voix, selon les résultats non encore définitifs publiés par la commission électorale. Le leader de la gauche, Hamdine Sabahi, seul responsable politique à avoir osé le défier, n’a obtenu que 4%. Leader de facto depuis l’été dernier, Al-Sissi est désormais officiellement en charge du pouvoir exécutif mais aussi législatif, le pays n’ayant plus de Parlement depuis près d’un an.
Il y a encore trois ans, alors qu'Hosni Moubarak est chassé du pouvoir, le peuple égyptien ne sait rien d'Abdel Fatah al-Sissi. Depuis, son image s'est affichée partout, mais l'homme n'a levé qu'en partie le voile sur sa vie ou sa personnalité. Il a fait campagne en évitant la foule, préférant les réunions en petit comité aux grands meetings publics. Ni très bon orateur ni réellement charismatique, il a toutefois suscité l'engouement d'une partie des Egyptiens. «Cet homme a risqué sa vi