Il est le portrait inversé d’Oussama ben Laden : sur les vidéos, le Saoudien apparaissait soigné, bien mis et, même traqué, au fin fond des âpres vallées de l’Hindu Kush, entre Afghanistan et Pakistan, il n’était jamais sans élégance. Face à la caméra, volontiers complaisant avec elle, il cultivait une image d’aristocrate du jihad international.
Celui qui prétend le remplacer, Abou Bakr al-Baghdadi ne joue pas, lui, sur le registre de la séduction. Au contraire, il fuit les regards, ne se montre jamais, ne dévoile même pas le bout d'une oreille. Il n'existe d'ailleurs que deux photos de lui - mais est-ce bien lui ? - l'une du FBI, l'autre du ministère irakien de l'Intérieur (ci-dessus). La première nous montre un homme au visage un peu bouffi, mal rasé, le cheveu court, avec des yeux inexpressifs, où ne flambe aucune lueur, aucune passion, pas même la haine, et qui évoque davantage un camionneur turc au bout d'un long périple qu'un religieux et chef islamiste de haut vol. La seconde n'est pas moins mystérieuse : il porte veste et cravate, d'où cette impression de notable aisé, renforcée par une barbe bien taillée.
Extrême cruauté. En fait, Abou Bakr al-Baghdadi est un homme invisible, qui existe sans exister et dont on ne sait quasiment rien. Mais c'est lui que veulent désormais suivre les jihadistes du monde entier, y compris des centaines de jeunes musulmans des banlieues françaises.
Cette énigme contribue d’ailleurs à faire la f