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Libération
Interview

«Les combattants migreront vers l’Afghanistan»

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Gilles Dorronsoro, professeur de sciences politiques, pointe l’échec américain :
publié le 16 juin 2014 à 19h56

Gilles Dorronsoro est professeur de sciences politiques à l’université Paris-I-Panthéon-Sorbonne. Il analyse les conséquences de l’offensive de l’armée pakistanaise contre les talibans.

Pourquoi le gouvernement pakistanais a-t-il décidé d’intervenir dans les zones tribales du Waziristan ?

Islamabad a toujours eu une relation ambiguë avec les talibans pakistanais. Il y a des phases de quasi-cessez-le-feu et des phases d’escalade militaire, avec notamment une précédente opération militaire pour les chasser de la vallée de Swat, au nord de la capitale. Aujourd’hui, le gouvernement a de toute évidence renoncé à négocier avec eux, notamment après l’attaque de l’aéroport de Karachi. L’échec des négociations s’explique aussi par la fragmentation du mouvement des talibans en une nébuleuse de groupes radicaux qui ont des demandes et des revendications différentes.

Quelles conséquences l’opération pakistanaise peut-elle avoir en Afghanistan ?

La plus directe sera la migration vers l’Afghanistan de combattants aujourd’hui basés au Waziristan. Même s’ils n’ont ni les mêmes méthodes ni les mêmes objectifs, les talibans afghans et leurs homologues pakistanais cohabitent en général assez bien sur le terrain. Mais cet accord tacite peut se rompre en cas d’afflux massif de combattants du Pakistan dans les provinces frontalières afghanes de Kunar et du Nouristan (nord-est), où les talibans pakistanais sont présents en force. Leur présence génère des tensions avec la population.

Faut-il également craindre un renforcement d’Al-Qaeda en Afghanistan ?

La présence renforcée d’Al-Qaeda est liée au retrait américain et à l’implantation des talibans afghans. Paradoxalement, après plus d’une décennie de présence américaine, l’Afghanistan est plus sûre a