Personne n'a fait attention à eux ce samedi-là. Nous sommes le 10 novembre 1990. Deux étudiants birmans de 23 et 24 ans embarquent à bord d'un Airbus A300 de la Thai Airways effectuant la navette Bangkok-Rangoun. Trente minutes après le décollage, l'un des deux, Htin Kyaw Oo, se lève et s'adresse aux 221 passagers et membres d'équipage : «C'est une prise d'otages. Restez calmes et assis, ne bougez pas.»
Autour du cou, il a un cordon électrique connecté à un interrupteur et relié à la statue d'un bouddha souriant qu'il dit rempli d'explosifs. En fait, du savon liquide. Pendant ce temps, Soe Myint, second de l'équipe, visage poupin, se rue en tête de l'appareil : «Je n'avais jamais pris l'avion. Je ne savais pas où se trouvait le cockpit. Arrivé en classe affaires, je trouve une porte, je l'ouvre. C'était les toilettes ! se souvient-il aujourd'hui en éclatant de rire. Paniqué par l'arrivée d'une hôtesse, j'ouvre une autre porte et je me trouve face à trois pilotes.» En quelques minutes, Soe Myint, l'étudiant modèle, se propulse en preneur d'otages façon Pieds nickelés, en opposant culotté à la junte.
Pourtant, tout destinait ce petit homme-là à devenir un fidèle du régime, un commis de l'Etat, un serviteur dévoué d'une Birmanie accaparée par les généraux. Avec ses mains fines, ses manières affables et son ton posé derrière de sages lunettes, il le reconnaît lui-même : «J'ai été formé pour être un haut fonctionnaire, un diplomate, j'étais même susce