Simon Grivet, historien des Etats-Unis associé au Centre d'études nord-américaines de l'EHESS, a consacré son doctorat à la peine de mort outre-Atlantique. Selon lui, les «scandales suscités par les erreurs judiciaires» ont fait reculer le soutien à la peine capitale.
Est-ce que l’exécution particulièrement sordide de Joseph R. Wood va changer quelque chose ?
Quelque chose va changer dans son application, mais je serais beaucoup plus prudent sur l’abolition de la peine de mort elle-même. Certes, le soutien à la peine capitale est à un niveau historiquement bas : à peine la moitié des 300 millions d’Américains y sont favorables. Cela s’explique par les scandales suscités par les nombreuses erreurs judiciaires constatées après un certain nombre d’exécutions. Une deuxième raison, c’est le fait que les appels durent très longtemps : dans ce dernier cas, Joseph R. Wood n’a été exécuté que vingt-cinq ans après avoir commis son crime. Une troisième raison, c’est la brèche qu’a réussi à ouvrir l’argumentation de la détention à perpétuité, comme solution à la fois plus logique et plus cruelle.
Les abolitionnistes ont-ils changé de stratégie ?
Le référendum de 2012 pour l’abolition de la peine de mort en Californie s’est conclu avec une étroite défaite des abolitionnistes. Ils avaient mené campagne sur l’irrationalité et sur les coûts de ce système, sur le fait qu’il ne marche pas, sur son inutilité. Les abolitionnistes ont arrêté le moralisme. Mais des pôles de résistance demeurent. Il y a les procureurs, qui, aux Etats-Unis, sont élus par la population et sont donc des politiciens. Il y a la volonté des proches des