Mon histoire se passe entre 1916 et 1919. C'était il y a bien longtemps, moins longtemps que l'histoire d'Ataï, le chef canaque et son crâne qu'on vient de rendre aux siens, en Nouvelle-Calédonie, (encore un nom bien colonial), aux Canaques. J'ai bien aimé le beau texte de Daeninckx à ce sujet (1). Cela m'a donné des idées. Il y a certainement bien d'autres trophées macabres du colonialisme triomphant enfouis, oubliés dans les réserves des musées. Il y en a peut-être un au British Museum. A vérifier. Celui de Ntokibiri.
Ntokibiri, cela signifie deux doigts, deux doigts en plus je suppose. Ntokibiri, c'était un prophète, un sorcier, a witchdoctor, comme disaient les Blancs. En lui s'était incarné un esprit féminin, Nyabingi, qui possédait plutôt les jeunes filles car c'était une sorte de déesse-mère terrible et bienfaisante à la fois, qui donnait et guérissait les maladies, et surtout rendait fécondes les femmes stériles. Elle a été loin Nyabingi, elle a été jusqu'en Jamaïque, elle est devenue Nyabinghi chez les rastas qui lui ajoutèrent un h.
Donc, en 1917, Ntokibiri a pris la tête d’une révolte contre les puissances coloniales : Anglais et Belges. Il a sans doute profité de la Grande Guerre qui avait quelque peu désorganisé l’administration coloniale encore mal établie. Oui, les Européens se sont fait aussi la guerre en Afrique, particulièrement en Afrique